Comme un elfe de maison dans Harry Potter. Circulez, y a rien à voir.

Berk est un gobelin qui n’attire pas le regard. Il passe souvent inaperçu, voire répugne les âmes les plus sensibles.

Comme tous ses congénères, il est petit et difforme. Le teint de sa peau rêche entre le vert et le gris, qu’on confondrait avec la crasse incessante à laquelle il se confronte au quotidien. Il peut parfois vous surprendre si vous croisez son regard perçant, pareil à deux citrines luisantes. Il possède deux oreilles pointues et décollées qui lui donnent un air tout à fait ridicule. Son visage ridé et son expression quasi constante de sourire narquois — dévoilant au passage des dents pointues et sales — trompent facilement les foules et il fait facilement plus vieux que son âge. De sa silhouette frêle, habile et élancée, il se meut avec des jambes grêles. Ses mains et ses pieds sont crochus.

Son style vestimentaire ? Sommaire. Même une gens de la rue qui vit sans le sous ne voudrait pas de ses habits. De piètre facture et en lambeaux, il lui offrent une protection rudimentaire pour le travail. Les seuls artifices qu’il s’est d’ailleurs permis sont des anneaux qu’il a suspendu à ses oreilles. Fougue de jeunesse ? Allez savoir.

Sa voix ? Nasillarde, mais pas désagréable. Il sait parler avec le diaphragme ; indispensable pour se faire entendre ici bas, où grondent les machines et le fracas.

Toujours trouver une raison de sourire, quelque soient les circonstances. Sourire sincère ou moqueur. N’afficher qu’un mépris désintéressé face à l’adversité et à l’oppression. Faire de ses faiblesse une force véritable.

Le quotidien de Berk n’est pas des plus exaltants. C’est une ressource surexploitée et inconsidérée. Si vous voulez le déstabiliser, commencez par lui accorder de la considération. Il aurait du mal à se moquer de vous, mais le ferait quand même, telle une mécanique de protection.

Berk est moqueur et a un sens de l’humour plus que douteux. Pour lui, la vengeance est un plat qui se mange glacé. Rancunier, il peut se venger des années plus tard pour une minable crasse qu’on a pu lui faire. Et s’en délecter ensuite.

Gobelin égal à lui-même, malgré son jeune âge, c’est un philomathe qui s’ignore. L’ésotérisme, il le digère. Peut-être pas instantanément, mais c’est quelque chose qui prévaut au-delà de son rapport aux choses. Il est bien trop gauche avec les êtres doués de conscience pour se détourner d’une machine dont il saurait percer tous les secrets.

« Berk ! »

C’est la première chose qu’a éructé la génitrice du petit Stenzogs après qu’elle l’a mis au monde. Un rejeton de plus ou de moins né dans la crasse, sans que son paternel ne se manifestât. C’est aussi l’onomatopée qu’on répétait le plus quand on voyait ce gobelin disgracieux et plus grand que ses congénères. Il ne tarda pas à en faire un pseudonyme, comme pour assumer le rejet dont il pouvait être victime. Berk ne disposa d’ailleurs que trop peu de la considération de sa génitrice, ni de sa fratrie qui souffrait des mêmes maux pour certains. Inutile de dire que certains se perdirent en cours de route faute d’une vie trop rude. Le gobelin comprit vite, inconsciemment, qu’il devait se forger une carapace quelconque pour survivre.

Son acquit de conscience le rendit mature plus tôt que ses semblables. Il apprit également qu’étaler son intelligence à ses pairs n’était pas la meilleure chose à faire. Il apprit à feindre la connerie et l’ignorance. Se faire petit malgré son gabarit de manche à sucette.

Il dut ainsi se rendre utile rapidement en contribuant aux bases besognes qu’on avait besoin de déléguer à Ineth’Uru, du ramassage d’ordures jusqu’au transport de marchandises. D’un tempérament fourmi, ce fut l’occasion pour lui de mettre des finances de côté pour investir dans tout ce qui avait commencé à susciter un intérêt pour lui : les mécanismes, se triturer les méninges sur le pourquoi du comment…

Il développa en secret sa première invention, après des informations qu’il avait compilées dans des ouvrages qu’il avait pu « emprunter en cachette » : un monocle mécamagique qu’il mit rapidement à profit. Réussissant à passer des serrures, il se mit en quête de larcins, toujours plus gros. Un jour, il essaya de pénétrer dans la demeure d’un industriel mais se fit prendre.

Depuis lors ? Il travaille pour cet industriel qui développe des machines-outils destinées à opérer dans les Entrailles. Un esclavagiste assumé qui a plusieurs gobelins à sa solde. Berk fait partie de sa force de travail — c’était çà où le néant. Inutile de dire qu’il s’est gardé d’informer son propriétaire qu’il avait inventé un monocle mécamagique. Cela lui attirerait plus de problèmes que de sympathie.

Aujourd’hui, Berk travaille sous terre avec ses collègues et fait profil bas. Lorsqu’il jouit d’un peu de temps libre après s’être attiré les grâces de son patron, on le voit souvent roder à Ineth’Uru à contempler le panorama et se demander quel esprit à pu produire quoi, et dans quelles conditions. Ces hauteurs qui lui donnent des rêves de grandeur.

Quelle vie on mène tout de même quand on a quatorze ans.

Le gobelin n’a jamais quitté Ineth’Uru. Au-delà de l’archipel s’étendent des royaumes ou des empires. Au-delà des royaumes et des empires s’étendent des flots à perte de vue. Et l’inexploré. Et l’Univers tout entier.

Mais pour ce qui n’est pas encore explorer, que dire de l’Esprit ?