Malgré la coiffure négligée de sa chevelure châtain et le clair manque d'attention qu'elle porte à sa tenue, la beauté de cette elfe élancée frappe celui qui la pose le regard sur elle. Ses membres fins et graciles sont ceux d'une personne qui n'a jamais été forcée à pratiquer une activité physique intense. Par contre, ses doigts, entre lesquels est souvent logée une mine de plomb ou un outil à l'allure mystérieuse, manient l'un et l'autre avec une dextérité qui n'a rien à envier à celles d'un bon musicien. Souvent, es yeux d'un bleu gris qui rappelle les ciels d'orage semblent perdus dans un univers lointain. Elle s'habille souvent des premiers vêtements qui lui sont tombés sous la main, et se déplace rarement sans de quoi noter ses observations, ses idées, et tout une sacoche d'outils à la fonction inconnue, de rouages d'horlogerie assemblés en d'étranges mecanismes et de fioles au contenu aussi mysterieux qu'inquiétant.

Un esprit assoiffé de savoir et de création. Pour Karalina, tout est sujet de questionnement, de remise en question, d'amélioration, et d'exploration. La terre, la mer et les cieux recèlent des merveilles et des ressources infinies qui n'attendent que d'être découvertes, et peut-être exploitées. La demoiselle est dotée d'une curiosité en apparence sans limite pour tout ce qui l'entoure. Elle est immanquablement tentée par toutes les nouvelles expériences qu'on peut lui proposer, quitte à réaliser bien trop tard dans quelle situation désagréable elle s'est fourrée. Si elle a une intuition naturelle pour tout ce qui concerne, de prés ou de loin, les lois cachées qui gouvernent l'ordre naturel des choses. Celui des hommes, à contrario, ne l'intéresse guère,  l'agace parfois et lui échappe souvent, pour son plus grand malheur.

Elle peine à comprendre ceux qui dépensent tant d'énergie à prouver leur puissance en s'écrasant les uns les autres, comme si, convaincus intérieurement de leur médiocrité, ils se sentaient obligés de devoir éliminer ceux qui leur font de l'ombre. Pour elle, les moyens, l'argent, les richesses n'existent que pour étendre le savoir, pour réaliser des choses plus grandes encore. Avide de partager ses expériences mais peu pédagogue, Kara manque parfois de diplomatie. Attachée à sa liberté, la jeune elfe hait ceux qui tentent de la lui retirer

L'école Polytechnique d'Arkheynos

Le saint empire ne chôme jamais. Joyaux de l'humanité, assailli par des adversaires puissants, il doit s'adapter et se montrer à la hauteur des défis auxquels il fait face. Grace à leur force, leur ingéniosité, leur détermination et leur loyauté sans faille, les hommes et les femmes de l'empire accompagneront l'empereur sur le chemin de la victoire. Confronté aux possibilités infinies des sciences et de la magie et à son retard, l'empire a rapidement réalisé qu'il avait besoin d'une école sélective qui  formerait une future élite scientifique et technique pour la mettre au service des ambitions de l'empereur. Comprenant un internat, des salles de cours mais aussi des laboratoires dans son propre campus, l'école, encore récente, est localisée à Chimera Salem et emploie une forte majorité de professeurs nains, pour certains permanents et pour d'autres chargés de cours spécifiques. Les étudiants prometteurs sont identifiés au quatre coins de l'empire, et même si la majorité d'entre eux proviennent de familles puissantes, l'empire déniche parfois des talents dans des endroits inattendus. Ils y suivent un cursus exigeant  qui ne laisse pas de place à l'échec. La compétition entre eux est fortement encouragée, et l'école ne s'encombre pas avec celles et ceux qui s'avéreraient incapables de suivre le rythme de travail imposé par les professeurs.

Ici se forge l'avenir de l'empire, et ce dernier n'a que faire des médiocres.

Neanmoins, il n'est pas certain que l'avenir se révèle radieux pour l'école Polytechnique. Il se murmure que les expériences aussi innefables que secrètes prolifèrent dans ses laboratoires. Au même moment, l'inquisition dirige sur elle son regard impitoyable, car qui pourrait imaginer ce qui pourrait se produire en réunissant autant d'audacieux esprits au même endroit pour leur demander de réfléchir.

Karalina, dit "Kara"

Quelconque, sans intérêt. C'est ainsi qu'on pourrait décrire la famille d'elfes dans laquelle est née Karalina il y a de cela 24 ans. Bourgeois installés dans la capitale, ils possédaient plusieurs entrepôts disséminés au travers du Saint Empire. Assez riches pour vivre confortablement, mais trop peu pour posséder du pouvoir, ils faisaient partie de ces si nombreux rouages remplaçables qui font de l'empire une machine de guerre bien huilée. Ils n'étaient peut-être pas importants, mais les parents de la jeune Karalina payèrent la meilleure éducation qu'ils pouvaient se permettre. Très tôt, elle se révéla une enfant solitaire et curieuse, dans tous les sens du mot. Rêveuse et mal à l'aise avec ses congénères qui vite la moquèrent, elle était capable de passer des heures à observer un insecte, une fleur, une machine, ou simplement à regarder le ciel. Elève douée et sérieuse, elle excella rapidement en sciences, et pointait parfois avec innocence les erreurs de ses professeurs dans leurs démonstrations et leurs calculs. Cette attitude pour certains détestable et pour d'autres admirables, elle la conservera tout au long de ses études.

A ses 18 ans, elle fut identifiée par les autorité comme susceptible d'intégrer les rangs de l'école Polytechnique d'Arkheynos afin de devenir une ingénieure au service de l'empire. Et c'est ainsi que, pour la première fois, Karalina fut séparée de sa famille pour être placée dans les hauts murs couverts de suie de l'académie. C'est dans cet environnement  de compétition intellectuelle impitoyable qu'elle se révéla. Se jetant à corps perdu dans le travail sans se soucier des accomplissements de ses camarades si ce n'était pour apprendre de leurs réussites comme de leurs échecs, la jeune Karalina se nourrit de ce que ses professeurs avaient à lui enseigner. Si la jeune elfe trouva des camarades partageant sa quête du savoir, elle s'attira la jalousie de nombre d'autres, et sa beauté suscita le désir de certains. En particulier, et à son insu, elle devint peu à peu l'obsession d'Alexandre Adrien Antony Alphonse van Haupstatt van Lunen, jeune homme aussi talentueux qu'ambitieux, cadet sans grand héritage d'une noble et puissante famille de l'empire. Meilleure que lui dans leurs études major de promotion alors que lui n'était que deuxième, séduisante, elle lui faisait qui plus était l'affront de ne pas le remarquer, et pire, l'insulte inexcusable de l'indifferer.

Pendant ce temps, Karalina s'épanouit dans l'école. Il circulait entre certains élèves des idées qu'il ne fallait mieux pas partager. Des idées de liberté. Combien de talents l'empire gaspillait-il en ne donnant pas à chacun de ses sujets les moyens de s'accomplir? Pourquoi l'empereur et son entourage étaient-ils plus dignes que d'autres de gouverner? Concentrer ainsi les pouvoirs entre les mains d'un seul homme était-il optimal? Karalina rejoint bientôt leurs réunions secrètes dans les salles oubliées et ténébreuses des sous sols de l'école. Là ils refirent le monde.

Mais un traitre opérait dans les rangs (clairsemés) de ce club secret. Il informa Alexandre Adrien Antony Alphone (qu'on appellera à partir de maintenant Alexandre pour plus de simplicité) qui triompha intérieurement: Il avait découvert le vice, la faiblesse de Karalina, et comptait bien l'exploiter pour enfin posséder celle qui lui échappait.

Le mariage des deux tourtereaux fut célébré l'été suivant. Tous louèrent la beauté de la mariée. Son rang, évidemment, ne l'égalait pas, mais sa famille apportait à Alexandre des moyens financiers qui sinon lui auraient manqué. En échange de se soumettre aux désirs de son némésis, Alexandre avait promis à Karalina que son secret et celui de ses amis ne serait pas éventé. Bien évidemment, ce fut faire preuve de naïveté, car c'était un risque que lui n'était pas prêt à prendre. Après tout, combien de temps faudrait il à l'inquisition pour découvrir à son tour ses imbéciles, et qu'elle les contraignent à parler de son nouveau jouet ?  

Ainsi, quelques jours à peine après  la nuit de noce, ceux que Karalina avait voulu protéger moururent  dans un  tragique et  regrettable accident de laboratoire  malgré les efforts héroïque d'Alexandre pour les sauver. Horrifiée, Kara prit la fuite au grand agacement de son nouveau mari et disparut dans le chaos de l'empire, laissant derrière elle sa carrière et sa famille, vivant de l'argent qu'elle avait pu emporter et de tous les petits emplois qu'elle pouvait dénicher.

Un peu plus tard, elle parvenait à rejoindre Havresac sans avoir été retrouvée.

Seule, sans le sous, mais libre. Avec le monde qui s'offrait à elle.